Bibouille

Questions de fille(s)

Publié le 19/05/2015 | Billet d'humeur

L’édito de Valérie Dietrich
Paru dans Bibouille #68

 

Depuis ma sortie de cette période de l’enfance où je me rêvais «équipée pour faire pipi debout», je me suis toujours définie comme une fille. Petite ou grande (fille) suivant les époques et les contextes, parfois jeune (fille), mais invariablement une fille (et non pas une femme), malgré mes, aujourd’hui, 40 ans passés.
Ma mère, mes grand-mères, et tant d’autres encore, sont pour moi des femmes. Certaines de mes amies ou connaissances, indifféremment de leurs âges, situations familiales ou professionnelles sont des filles. Une distinction linguistique que mon esprit opérait aussi naturellement qu’inconsciemment jusqu’à ce que ma fille vienne jeter son pavé sur l’amarre.

Depuis quelques années, elle ne s’entoure que de garçons, ne joue qu’à «des jeux de garçons» et ne cesse de répéter qu’elle n’est pas une fille, ou du moins qu’elle ne souhaite pas en être une.

Un questionnement identitaire qui alimente nos échanges (non, en effet tu n’as pas un corps de garçon, en revanche oui tu as le droit d’aller vers ce que tu aimes, là où tu te sens bien) et qui a, petit à petit, forcé les verrous de mon obscure tambouille interne.

J’ai soudain pris conscience que la «fille» était pour moi une sorte d’antichambre de la «femme». Un territoire à part dans l’univers de la féminité, moins exposé et moins balisé. Que, si je ne me désignais pas femme c’est aussi bien parce que je ne me sens pas (encore?) la légitimité de prétendre à ce titre de noblesse mais aussi, et surtout, afin de me ménager des horizons plus vastes.

Se pose alors la question de la place des mots. Peut-on trouver sa place si les mots ne le sont pas… à leur place. Ma fille (lignée) peut-elle trouver sa place de fille (féminité), si je me définis moi aussi comme une fille (représentation sociale)? Faut-il que je me repositionne pour lui permettre d’investir pleinement ses propres territoires?

Tandis que ces interrogations cheminent en moi, je me sens muer. Sans doute existe t-il un espace alternatif à explorer entre la fille et la femme. Un espace alternatif où évolueraient également (peut-être?) des garçons/hommes avec qui je pourrais enfin mieux m’accorder.

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